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Mertesacker en Iran : "J'étais submergé"

À l'issue de sa 104e sélection le 13 juillet 2014, Per Mertesacker est devenu champion du monde au Brésil, couronnant ainsi une grande carrière internationale de la plus belle des manières. Une carrière qui avait commencé dix ans plus tôt, dans des circonstances particulières. Dans un entretien avec DFB.de, Mertesacker se remémore ses débuts.

DFB.de : Monsieur Mertesacker, votre carrière internationale a débuté comme pour la plupart des internationaux avec un appel du sélectionneur. Vous en souvenez-vous encore ?

Per Mertesacker : Tout à fait car ma convocation a eu lieu lors d'un jour spécial. C’était le 29 septembre 2004.

DFB.de : Votre anniversaire.

Mertesacker : Exact. Je venais d’avoir 20 ans à l’époque et tout à coup, j’avais le sélectionneur au téléphone. Jürgen Klinsmann m’a appelé, sans me souhaiter mon anniversaire du reste. À vrai dire, c’est une honte (rires).

DFB.de : Il avait autre chose à vous annoncer.

Mertesacker : Il a dit qu’il souhaitait apporter un nouveau souffle dans la Mannschaft et que j'avais le profil pour cela. Je ne me rappelle plus exactement de chacun de ses mots, je sais juste que j’ai prononcé « oui » assez fréquemment. Mais il ne m’a pas souhaité mon anniversaire, je m'en souviens.

DFB.de : Lui en avez-vous voulu ?

Mertesacker : Ah non ! Lorsqu’on reçoit un appel du sélectionneur pour la première fois, on oublie presque que c’est son anniversaire.

DFB.de : Étiez-vous surpris de cette convocation ?

Mertesacker : Complètement. J’étais à peine devenu un joueur de Bundesliga. J’avais en plus commencé après le bac mon service civil en parallèle du foot, j’étais bien occupé. La Mannschaft me semblait alors très loin.

DFB.de : Vous avez à l’époque effectué votre service civil dans un hôpital spécialisé pour les handicapés mentaux. Qu'avez-vous fait là-bas ?

Mertesacker : Tout. Je me suis occupé des patients et de tout ce qui allait avec. Je jouais avec eux dans la mesure du possible mais cela faisait partie du programme. J’ai cuisiné pour eux, je les ai lavés, accompagnés aux toilettes. Chaque employé avait cinq patients à sa charge, nous avons effectué des soins intensifs. C’était une période intense mais avant tout enrichissante. C'était une période agitée avec la Bundesliga puis avec cette convocation.

DFB.de : Était-ce dur de concilier les deux ?

Mertesacker : C’était exigeant. Au début, c’était intéressant de voir comment je m’en sortais. Les patients étaient des handicapés mentaux, un seul d’entre eux pouvait à peu près s’exprimer. Il arrivait souvent que les patients se mettent soudainement à courir vers moi en criant. Dès que c’était l’heure de manger, il pouvait y avoir de temps en temps des agressions. On doit apprendre à s’adapter. C’était pour moi une leçon de vie. Cela m’a aidé au début de ma carrière, ça me faisait sortir du monde du football. Je n’étais pas le footballeur là-bas, j’étais l’infirmier, c’était très utile pour rester humble. Ce moment m’a forgé, j'en conserve des souvenirs encore aujourd’hui.



À l'issue de sa 104e sélection le 13 juillet 2014, Per Mertesacker est devenu champion du monde au Brésil, couronnant ainsi une grande carrière internationale de la plus belle des manières. Une carrière qui avait commencé dix ans plus tôt, dans des circonstances particulières. Dans un entretien avec DFB.de, Mertesacker se remémore ses débuts.

DFB.de : Monsieur Mertesacker, votre carrière internationale a débuté comme pour la plupart des internationaux avec un appel du sélectionneur. Vous en souvenez-vous encore ?

Per Mertesacker : Tout à fait car ma convocation a eu lieu lors d'un jour spécial. C’était le 29 septembre 2004.

DFB.de : Votre anniversaire.

Mertesacker : Exact. Je venais d’avoir 20 ans à l’époque et tout à coup, j’avais le sélectionneur au téléphone. Jürgen Klinsmann m’a appelé, sans me souhaiter mon anniversaire du reste. À vrai dire, c’est une honte (rires).

DFB.de : Il avait autre chose à vous annoncer.

Mertesacker : Il a dit qu’il souhaitait apporter un nouveau souffle dans la Mannschaft et que j'avais le profil pour cela. Je ne me rappelle plus exactement de chacun de ses mots, je sais juste que j’ai prononcé « oui » assez fréquemment. Mais il ne m’a pas souhaité mon anniversaire, je m'en souviens.

DFB.de : Lui en avez-vous voulu ?

Mertesacker : Ah non ! Lorsqu’on reçoit un appel du sélectionneur pour la première fois, on oublie presque que c’est son anniversaire.

DFB.de : Étiez-vous surpris de cette convocation ?

Mertesacker : Complètement. J’étais à peine devenu un joueur de Bundesliga. J’avais en plus commencé après le bac mon service civil en parallèle du foot, j’étais bien occupé. La Mannschaft me semblait alors très loin.

DFB.de : Vous avez à l’époque effectué votre service civil dans un hôpital spécialisé pour les handicapés mentaux. Qu'avez-vous fait là-bas ?

Mertesacker : Tout. Je me suis occupé des patients et de tout ce qui allait avec. Je jouais avec eux dans la mesure du possible mais cela faisait partie du programme. J’ai cuisiné pour eux, je les ai lavés, accompagnés aux toilettes. Chaque employé avait cinq patients à sa charge, nous avons effectué des soins intensifs. C’était une période intense mais avant tout enrichissante. C'était une période agitée avec la Bundesliga puis avec cette convocation.

DFB.de : Était-ce dur de concilier les deux ?

Mertesacker : C’était exigeant. Au début, c’était intéressant de voir comment je m’en sortais. Les patients étaient des handicapés mentaux, un seul d’entre eux pouvait à peu près s’exprimer. Il arrivait souvent que les patients se mettent soudainement à courir vers moi en criant. Dès que c’était l’heure de manger, il pouvait y avoir de temps en temps des agressions. On doit apprendre à s’adapter. C’était pour moi une leçon de vie. Cela m’a aidé au début de ma carrière, ça me faisait sortir du monde du football. Je n’étais pas le footballeur là-bas, j’étais l’infirmier, c’était très utile pour rester humble. Ce moment m’a forgé, j'en conserve des souvenirs encore aujourd’hui.

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DFB.de : La Mannschaft était également un nouveau monde. Vous souvenez-vous encore de vos premières minutes dans l’hôtel de l’équipe à Munich ? Quelles ont été vos premières impressions ?

Mertesacker : J’ai eu la chance que Thomas Brdaric soit présent. Il jouait à Wolfsbourg à l’époque mais je le connaissais de Hanovre. Il m’a pris sous son aile, ce qui a grandement facilité les choses. J’étais avec lui lors des repas, des briefings, à tous les rendez-vous. Mais c’est aujourd’hui pareil qu’à l’époque : on ne peut que se sentir bien dans ce groupe. Le staff est formidable, chacun aide où il peut, ils sont tous aimables et soucieux, les coéquipiers et entraîneurs aussi. Cela m’a immédiatement impressionné. J’ai vécu dix années exceptionnelles grâce à ça.

DFB.de : Vous partiez de Munich pour rejoindre l’Iran. L’arrivée à l’aéroport fut pour tous une expérience presque inimaginable. La Mannschaft fut accueillie par des milliers de fans, les joueurs couverts de fleurs, des scènes indescriptibles s’y déroulaient. Trouviez-vous cela irréel ?

Mertesacker : J’étais simplement submergé, et je n'étais pas le seul. Je garde des souvenirs confus de ces minutes. La foule, l’engouement, la poussière partout, la chaleur, l’atmosphère étouffante, le chaos dans les rues... Tellement de gens chaleureux étaient venus, c’était de la folie. Mais c’était presque trop pour moi, c’était surréaliste.

DFB.de : Espériez-vous avoir du temps de jeu contre l’Iran ?

Mertesacker : Une fois qu’on y est, on veut évidemment jouer. Mais je prenais les choses comme elles venaient. Il n’y a pas eu de conversation avec Jürgen Klinsmann au préalable. J’ai eu l’opportunité de pouvoir participer au match pendant quelques minutes. C’était évidemment génial pour moi.

DFB.de : Au moins 100 000 spectateurs étaient au stade à Téhéran, presque exclusivement des hommes. Comment avez-vous vécu l’atmosphère ?

Mertesacker : Le match était très particulier. Par exemple, le placement libre dans le stade faisait monter l'ambiance encore davantage. Le plus surprenant était la vitesse à laquelle le stade s’était rempli. En Europe, les rangs se remplissent souvent seulement lors des dernières minutes, à Téhéran le stade était déjà plein des heures avant. Lorsque nous sommes allés nous échauffer sur le terrain, l’atmosphère était déjà aussi impressionnante que pendant le match.

DFB.de : Avez-vous encore des souvenirs précis des 81 premières minutes du match ?

Mertesacker : Pas totalement. Mais je me souviens que Fabian Ernst et Thomas Brdaric ont marqué. Et qu’Ali Karimi avait été énorme, il nous avait donné le tournis.

DFB.de : Avant votre entrée à la place Christian Wörns, Jürgen Klinsmann vous a adressé quelques mots. Vous rappelez-vous de ce qu'il vous a dit ?

Mertesacker : Je ne sais plus. De toute façon, avec le bruit dans ce stade, cela n’aurait rien changé. « Vas-y », « Prends de l'expérience », « Reste calme », « Joue ton jeu »… ça devait être quelque chose comme ça.

DFB.de : Lors de votre entrée en jeu, souhaitiez-vous vous mettre en évidence par une action marquante ou était-ce l’idée de ne pas faire d'erreur qui prédominait ?

Mertesacker : Pour une première sélection, on joue la sécurité, des ballons simples. Il fallait gagner le respect et la confiance des coéquipiers. On veut sembler serein.

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DFB.de : Vous deveniez international allemand. Avez-vous immédiatement réalisé ce que cela signifiait ?

Mertesacker : On ne peut pas oublier, c’est quelque chose de grand. Tous te félicitent : les coéquipiers, les entraîneurs, les dirigeants et bien sûr tout le monde à la maison.

DFB.de : Y avait-il déjà en 2004 la tradition que les débutants tiennent un discours au banquet d'après-match ?

Mertesacker : Oui.

DFB.de : Comment cela s'est-il passé pour vous ?

Mertesacker : C'était très spécial. C'est autre chose qu'un exposé devant la classe.

DFB.de : Savez-vous encore ce que vous avez dit ?

Mertesacker : Je suppose que ce n’était pas très original. On n’exprime pas d’idées philosophiques dans cette situation. J’ai dit « Merci » pour le bon accueil, pour la confiance. Qu’ai-je dit de plus ? Ce qu’on dit habituellement : que je me sentais très bien, que c’était une super expérience et que je reviendrais bien. Les internationaux tiennent un discours similaire pour la plupart.

DFB.de : Vous êtes ensuite revenu en Allemagne et à votre travail quotidien avec les handicapés mentaux. Étiez-vous traité différemment là-bas ?

Mertesacker : Non, pas du tout. Les patients n’étaient pas en situation de comprendre. Ça m’allait d'ailleurs très bien comme ça.

DFB.de : Pourquoi très bien ?

Mertesacker : Car pas mal de choses changent quand on devient international, avant tout ses propres attentes. On veut confirmer ses performances, être à nouveau appelé. La Coupe du monde 2006 devenait d’un coup d’actualité pour moi, et plus seulement en tant que spectateur. Les médias deviennent curieux, on est sollicité par tout le monde. Beaucoup de choses que je ne voulais pas connaître se sont passées. Un peu de normalité faisait du bien.

DFB.de : Et vous l’avez justement trouvée dans un établissement avec des patients qui diffèrent de la norme.

Mertesacker : On peut le dire comme ça. Comme je l'ai dit : je n’étais ni le footballeur, ni l’international là-bas mais l’infirmier. C’était pour moi particulier de n’y connaître aucun traitement de faveur, c’était vraiment instructif.

DFB.de : Avez-vous eu un commentaire de la part de Jürgen Klinsmann à la fin du match ?

Mertesacker : Me sélectionner à nouveau était sa réaction la plus importante. Et il a rencontré mes parents. Il nous a préparé à tout ce qu’il pouvait se passer, également dans l’optique du mondial 2006. Cela m’a montré qu’il comptait vraiment sur moi et c’était une belle récompense.

DFB.de : Avec le recul, les circonstances particulières de votre première sélection étaient-elles importantes pour vous ?

Mertesacker : Je trouve que c'était une bonne chose. J’ai vécu des expériences inimaginables lors de mes 103 sélections suivantes : une Coupe du monde à domicile, le titre ensuite au Brésil... Mais je n’ai jamais rien connu d'aussi spécial et impressionnant que ma première sélection.

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