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Lothar Matthäus fête ses 60 ans : « Cela ne change rien du tout »

20 ans d’équipe nationale, champion d'Europe en 1980, champion du monde en 1990, sept fois champion d'Allemagne et deux fois vainqueur du DFB-Pokal. Le palmarès de Lothar Matthäus est incomparable. Aujourd'hui, le champion du monde évoque son incroyable carrière de joueur, son parcours d’entraîneur et ce qui a rendu son histoire si spéciale. Il célèbre ses 60 ans aujourd’hui, un chiffre qui ne l'affecte pas du tout.

DFB.de : Monsieur Matthäus, vous avez maintenant 60 ans. Quelle importance accordez-vous aux anniversaires ?

Lothar Matthäus : Dans les années passées, les anniversaires ont été précieux car ils étaient l’occasion de rencontrer mes amis. Maintenant, je vis en Hongrie donc je les vois moins souvent. C'est encore mieux lorsque nous pouvons passer du temps ensemble. Je me souviens avec émotion de nombreuses soirées et de nuits chaleureuses qui ont commencé en famille et se sont terminées par une réunion entre copains. L'année dernière, une telle rencontre n'a pas été possible à cause du coronavirus, nous nous sommes donc rattrapés en été. J'espère que nous pourrons faire de même cette année.

DFB.de : Avoir 60 ans a-t-il une signification particulière pour vous ? Avez-vous peur quand vous pensez à ce chiffre ?

Matthäus : Non, pas du tout. Je n'ai pas peur parce que je n'ai pas l'impression d'avoir 60 ans. Je suis en bonne santé, tout va bien pour moi et je suis en bonne forme. On ne peut pas changer son âge biologique et j'ai la soixantaine maintenant, mais rien ne change pour moi. Je ne vivrai pas ma vie différemment parce que j'ai maintenant 60 ans et non 59. J'ai trouvé moi-même un bon équilibre ; je fais attention à ma santé et je vais courir tous les jours, mais je n'en fais pas trop et je sais profiter de la vie.

DFB.de : Joachim Löw a confirmé qu'il quitterait son poste de sélectionneur après l'Euro 2021. Votre nom revient souvent comme un candidat potentiel pour lui succéder. Il y a quelques années, cela aurait été plus difficile à imaginer. Votre image publique avait... quelque peu besoin d'être améliorée. Ces spéculations soulignent à quel point cela a changé. Quelle importance cela revêt-il pour vous ?

Matthäus : Je ne veux vraiment pas montrer les autres du doigt. Je sais que j'ai fait des erreurs et que j'ai contribué à ma propre mauvaise réputation. Les petites erreurs sont devenues de grosses erreurs, et les grosses erreurs des scandales. J'ai dû apprendre à faire avec.

DFB.de : Pourquoi ?

Matthäus : À 20 ans, j'ai été sur le devant de la scène. Pendant deux décennies et demie, ma carrière n'a été qu'une longue série de succès avec seulement quelques petits revers. J'ai dû apprendre que certaines personnes attendent seulement qu’un malheur se produise. Je n'ai pas trouvé cela difficile. Je n'ai absolument pas besoin de cela, mais j'admets que c'est agréable de lire que les gens me font confiance pour ce travail.

DFB.de : Vous avez été entraîneur du Rapid de Vienne, du Partizan Belgrade, de l'Atlético Paranaense, du Red Bull Salzbourg et du Maccabi Netanya, ainsi que sélectionneur de la Hongrie et de la Bulgarie. Êtes-vous satisfait de votre carrière d'entraîneur ?

Matthäus : Je n'ai pas dirigé le Paris Saint-Germain, Barcelone ou le Bayern Munich. Mais j'ai presque toujours tiré le meilleur parti des opportunités qui m'ont été offertes. Les attentes étaient constamment élevées en raison de mon succès en tant que joueur. Il y a des gens qui espéraient remporter la Ligue des champions avec le Partizan, ou se qualifier immédiatement pour la Coupe du monde avec la Hongrie. Je n'ai pas répondu à ces attentes, mais elles n'étaient pas réalistes et ce n'étaient pas des choses que j'avais promises.

DFB.de : Quel rôle d'entraîneur a eu le plus grand impact pour vous ?

Matthäus : Tous. (rires) Avec le Partizan par exemple, nous avons été champions de Serbie. Ce n'était pas une surprise, mais le fait de gagner contre Newcastle lors des qualifications pour la Ligue des champions et de se qualifier pour la phase de groupe a été un véritable exploit. Le conseil d'administration était lui aussi sous le choc. Ils avaient prévu un énorme bonus dans mon contrat, ce qui leur a vraiment fait mal (rires). Cela peut paraître arrogant, mais je pense que toutes les équipes pour lesquelles j'ai travaillé ont bénéficié de mon travail. Le Rapid a été champion deux fois après mon départ, par exemple. Beaucoup de joueurs que j'ai découverts dans les équipes de jeunes ou en deuxième division y ont contribué.

DFB.de : Pourquoi pensez-vous que le public allemand s'intéresse davantage aux échecs qu'aux succès ? Est-ce un phénomène allemand que de vouloir voir les stars tomber ?

Matthäus : Je ne sais pas si c'est un phénomène exclusivement allemand, mais c'est définitivement un phénomène en Allemagne, malheureusement. Je n'en suis qu'un exemple. C'est plus extrême pour Boris Becker. On se réveillait au milieu de la nuit pour le regarder jouer au tennis, on l'idolâtrait. Franz Beckenbauer, qui a donné à notre nation plus que quiconque, est un autre exemple. Personne n'a droit à un laissez-passer parce qu'il était un bon athlète, mais j'aimerais ici et là un peu plus de recul et moins d'envie de se nourrir des problèmes de nos stars.

DFB.de : Y a-t-il des décisions que vous regrettez dans votre carrière d'entraîneur ?

Matthäus : Seulement quelques-unes. Je ne regrette pas d'être allé à Belgrade, je ne regrette pas d'avoir pris la direction de la Hongrie. J'ai passé de bons moments en Israël.

DFB.de : Vous avez résilié votre contrat après seulement une saison au Maccabi Netanya.

Matthäus : Je ne regrette toujours pas d'y être allé. Je demande aux gens de regarder de plus près. C'est facile de considérer mon année là-bas comme un échec, mais ils étaient en pleine crise financière à l'époque et le propriétaire a vendu le club. Puis les cordons de la bourse se sont resserrés. Avec le recul, je n'ai fait qu'une seule grosse erreur en tant qu'entraîneur.

DFB.de : Laquelle ?

Matthäus : Le Brésil. J'ai été le premier Européen à entraîner en première division là-bas. C'était un honneur pour moi. Mais arrêté l'aventure après seulement deux mois, alors que nous n'avions pas perdu un seul match officiel pendant cette période. Je le regrette encore aujourd'hui. Il y avait des raisons personnelles à l'époque, et le président l'a compris, mais cela reste une erreur. Je suis donc d'autant plus reconnaissant envers le peuple brésilien pour la chaleur qu’il continue de m’accorder.

DFB.de : Votre carrière en tant que joueur a été plus grande que celle d’entraîneur. Vous faites partie des meilleurs joueurs de tous les temps, en Allemagne et dans le monde. Vous avez joué beaucoup de grands matchs, et beaucoup d'entre eux très bien. Parmi vos 150 sélections, laquelle a été la deuxième meilleure ?

Matthäus : Pourquoi demandez-vous la deuxième meilleure ?

DFB.de : Parce que la meilleure est évidente : la victoire 4-1 contre la Yougoslavie lors de la phase de groupes d'Italie 90.

Matthäus : C'est exact. La deuxième meilleure est difficile à dire. De mémoire, je me souviens d’un match de la Coupe du monde 1986. Nous avons joué contre le pays hôte, le Mexique, en quart de finale et nous nous sommes qualifiés après une séance de tirs au but. Le score était nul et vierge après 90 minutes. Il n'y a pas eu de résultat spectaculaire, pas de buts de rêve, mais c'était vraiment intense. Beaucoup de choses se sont bien passées pour moi et j'ai eu beaucoup de bons moments. Je me suis senti bien tout au long du match et j'ai pris énormément de plaisir sur le terrain. J'ai également transformé mon penalty lors de la séance de tirs au but. Ce match figure définitivement sur ma liste personnelle de mes meilleures rencontres.

DFB.de : Quel match a été le plus important pour votre développement en tant que joueur de l'équipe nationale ?

Matthäus : Ils ont tous été importants. Mais surtout la tournée en Amérique du Sud en 1982, avec les matchs contre le Brésil et l'Argentine. Cela fait 39 ans aujourd'hui, le jour de mon 21e anniversaire, et nous avons joué devant 170 000 spectateurs au Maracanã. C'est la plus grande foule que j'ai jamais vue. Ce match, et celui contre l'Argentine peu après, ont été les premiers moments forts de ma carrière internationale. Ce sont les premiers matchs que j'ai disputés pour l'Allemagne.

DFB.de : Vous avez toujours été un buteur efficace en club, mais vous n'avez pas trouvé le chemin des filets en équipe d'Allemagne avant votre 33e sélection.

Matthäus : C'est vrai, mon premier but a été marqué en avril 1985 contre la Tchécoslovaquie. Je voulais évidemment marquer, il était temps. C'était une volée à Prague, un joli but après un centre de Thomas Berthold. Ce match a été un tournant dans ma carrière en équipe nationale. Évidemment, on est plus reconnu quand on contribue directement au succès, mais le plus important à cette époque était la confiance que Franz Beckenbauer me témoignait. J'étais également un joueur du Bayern à ce moment-là, ce qui m'a aidé à me faire une place au sein de l'équipe.

DFB.de : Quelle a été la meilleure décision que vous avez prise pendant que vous jouiez pour l'Allemagne ?

Matthäus : C'est évident : la décision de ne pas tirer le penalty en finale de la Coupe du monde 1990. J'avais tiré les leçons de la finale du Pokal 1984, où j'avais manqué un penalty que je ne voulais pas tirer. J'étais plus fort en 1990 et j'aurais pu assumer cette responsabilité. On dit souvent que j'avais peur et que je me suis dégonflé, mais ce n'est pas vrai. Tout d'abord, je n'avais pas peur, j'étais un bon tireur de penalty et j'avais déjà marqué en toute sécurité en quart de finale et en demi-finale. Normalement, il n'y aurait eu aucune raison de ne pas le tirer, mais en finale, j'ai dû changer de chaussures et je ne me sentais pas à 100% en confiance avec les nouvelles. Il aurait été fou et égoïste de le tirer moi-même. Aussi sûr que le ciel est bleu, je savais qu'Andi Brehme allait marquer. Pas seulement lui, mais il y avait aussi deux ou trois autres personnes dont j'étais sûr qu'elles résisteraient à la pression. Il aurait été irresponsable de prendre ce penalty.

DFB.de : Vous avez disputé 150 matches avec la sélection, ce qui fait de vous le joueur allemand le plus capé de tous les temps. Qu'est-ce que cela signifie pour vous ?

Matthäus : C'est arrivé comme ça (rires). J'ai eu le privilège de jouer au football à un haut niveau pendant une longue période et j'avais encore assez de jus pour continuer à un âge avancé. Je ressens une certaine satisfaction, car beaucoup de gens m'ont écarté après mes blessures et ont dit que je ne serais pas capable de revenir. Jouer au football est la chose qui m'a apporté le plus de bonheur et je suis très heureux d'avoir pu le faire pendant si longtemps. C'était, et c'est toujours, ma plus grande passion et mon plus grand amour. Jouer pour l'Allemagne a été le point culminant de ma carrière, et il n'y a rien de plus beau pour moi que d'enfiler ce maillot.

DFB.de : Voyez-vous votre record être battu ?

Matthäus : Très peu de records sont éternels. Un bon exemple en est Robert Lewandowski, qui semble bien parti pour battre le record de Gerd Müller (40 buts en une saison de Bundesliga). Je suis sûr que mon record sera battu un jour, mais ce jour ne semble pas près d'arriver. Manuel Neuer a probablement les meilleures chances de me battre. S'il parvient à maintenir son niveau actuel pendant quatre ou cinq ans, il pourrait me dépasser.

DFB.de : Vos successeurs dans l'équipe d'Allemagne ont une compétition importante à venir cet été, le championnat d'Europe. Compte tenu du caractère de l'équipe et de la qualité des joueurs, de quoi pensez-vous que l'équipe est capable ?

Matthäus : Le football allemand et l'équipe nationale allemande ont toujours une bonne réputation dans le monde, à juste titre. Nous ne devrions pas nous rabaisser. Naturellement, l'élimination de l'équipe en phase de groupes de la Coupe du monde 2018 a été un gros revers, mais cela ne change rien au fait que personne ne voudra jouer contre nous. Nous sommes craints et respectés en raison de la qualité et de la mentalité de nos joueurs. Il y a encore eu quelques revers récemment et des erreurs ont été commises, ce qui fait que les résultats ne vont pas toujours dans notre sens. Mais je dirais que l'Allemagne n'est pas la seule à traverser des périodes difficiles. Une chose est claire pour moi, c'est que nous ne pouvons et ne devons pas excuser nos défaites par celles des autres. L'équipe nationale doit être à la hauteur, et je crois qu'elle peut l'être.

DFB.de : Qu'est-ce qui vous rend optimiste ?

Matthäus : Je pense que la décision de Joachim Löw de mettre fin à sa carrière de sélectionneur national après le Championnat d'Europe a été prise au bon moment. Toutes les personnes concernées sont maintenant au clair et un débat potentiellement difficile a été évité. En dehors de cela, j’ai confiance dans la qualité de l'équipe actuelle. De nombreux joueurs jouent dans les plus grands clubs des meilleurs championnats d'Europe. Naturellement, je pense que nous pouvons faire bonne figure à l'Euro.

DFB.de : L'Allemagne affrontera le Portugal, la France et la Hongrie lors de la phase de groupes du Championnat d'Europe. Que pensez-vous de ce groupe ?

Matthäus : Je pense que c'est une très bonne chose que l'Allemagne soit mise au défi dès le début et qu'elle ne prenne pas le risque de sous-estimer ses adversaires. Nous devrons être concentrés dès la première seconde du premier match, mais je suis convaincu que ce sera le cas. Nous avons également trois matchs à domicile, ce qui est un gros avantage. Je suis sûr que si nous sélectionnons les bons joueurs et qu'ils sont performants, nous pouvons passer le cap de la phase de groupes et aller loin dans la compétition.

DFB.de : Qui sont les bons joueurs à votre avis ?

Matthäus : Mon avis sur la question est connu, mais cela dépend toujours de la composition de l'équipe, sur le plan tactique. Lors de la Coupe des Confédérations, le trio arrière composé de Niklas Süle, Antonio Rüdiger et Matthias Ginter a très bien fonctionné. Bien sûr, jouer dans cette formation signifierait que d'autres positions sont impactées, auquel cas Joshua Kimmich pourrait être amené à jouer un rôle différent. Il y a beaucoup de choses à prendre en compte et à considérer pour Joachim Löw. En tant que supporters, nous pouvons observer les options qu'il décide de prendre et lui dire ensuite si ses choix étaient les bons ou les mauvais (rires).

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20 ans d’équipe nationale, champion d'Europe en 1980, champion du monde en 1990, sept fois champion d'Allemagne et deux fois vainqueur du DFB-Pokal. Le palmarès de Lothar Matthäus est incomparable. Aujourd'hui, le champion du monde évoque son incroyable carrière de joueur, son parcours d’entraîneur et ce qui a rendu son histoire si spéciale. Il célèbre ses 60 ans aujourd’hui, un chiffre qui ne l'affecte pas du tout.

DFB.de : Monsieur Matthäus, vous avez maintenant 60 ans. Quelle importance accordez-vous aux anniversaires ?

Lothar Matthäus : Dans les années passées, les anniversaires ont été précieux car ils étaient l’occasion de rencontrer mes amis. Maintenant, je vis en Hongrie donc je les vois moins souvent. C'est encore mieux lorsque nous pouvons passer du temps ensemble. Je me souviens avec émotion de nombreuses soirées et de nuits chaleureuses qui ont commencé en famille et se sont terminées par une réunion entre copains. L'année dernière, une telle rencontre n'a pas été possible à cause du coronavirus, nous nous sommes donc rattrapés en été. J'espère que nous pourrons faire de même cette année.

DFB.de : Avoir 60 ans a-t-il une signification particulière pour vous ? Avez-vous peur quand vous pensez à ce chiffre ?

Matthäus : Non, pas du tout. Je n'ai pas peur parce que je n'ai pas l'impression d'avoir 60 ans. Je suis en bonne santé, tout va bien pour moi et je suis en bonne forme. On ne peut pas changer son âge biologique et j'ai la soixantaine maintenant, mais rien ne change pour moi. Je ne vivrai pas ma vie différemment parce que j'ai maintenant 60 ans et non 59. J'ai trouvé moi-même un bon équilibre ; je fais attention à ma santé et je vais courir tous les jours, mais je n'en fais pas trop et je sais profiter de la vie.

DFB.de : Joachim Löw a confirmé qu'il quitterait son poste de sélectionneur après l'Euro 2021. Votre nom revient souvent comme un candidat potentiel pour lui succéder. Il y a quelques années, cela aurait été plus difficile à imaginer. Votre image publique avait... quelque peu besoin d'être améliorée. Ces spéculations soulignent à quel point cela a changé. Quelle importance cela revêt-il pour vous ?

Matthäus : Je ne veux vraiment pas montrer les autres du doigt. Je sais que j'ai fait des erreurs et que j'ai contribué à ma propre mauvaise réputation. Les petites erreurs sont devenues de grosses erreurs, et les grosses erreurs des scandales. J'ai dû apprendre à faire avec.

DFB.de : Pourquoi ?

Matthäus : À 20 ans, j'ai été sur le devant de la scène. Pendant deux décennies et demie, ma carrière n'a été qu'une longue série de succès avec seulement quelques petits revers. J'ai dû apprendre que certaines personnes attendent seulement qu’un malheur se produise. Je n'ai pas trouvé cela difficile. Je n'ai absolument pas besoin de cela, mais j'admets que c'est agréable de lire que les gens me font confiance pour ce travail.

DFB.de : Vous avez été entraîneur du Rapid de Vienne, du Partizan Belgrade, de l'Atlético Paranaense, du Red Bull Salzbourg et du Maccabi Netanya, ainsi que sélectionneur de la Hongrie et de la Bulgarie. Êtes-vous satisfait de votre carrière d'entraîneur ?

Matthäus : Je n'ai pas dirigé le Paris Saint-Germain, Barcelone ou le Bayern Munich. Mais j'ai presque toujours tiré le meilleur parti des opportunités qui m'ont été offertes. Les attentes étaient constamment élevées en raison de mon succès en tant que joueur. Il y a des gens qui espéraient remporter la Ligue des champions avec le Partizan, ou se qualifier immédiatement pour la Coupe du monde avec la Hongrie. Je n'ai pas répondu à ces attentes, mais elles n'étaient pas réalistes et ce n'étaient pas des choses que j'avais promises.

DFB.de : Quel rôle d'entraîneur a eu le plus grand impact pour vous ?

Matthäus : Tous. (rires) Avec le Partizan par exemple, nous avons été champions de Serbie. Ce n'était pas une surprise, mais le fait de gagner contre Newcastle lors des qualifications pour la Ligue des champions et de se qualifier pour la phase de groupe a été un véritable exploit. Le conseil d'administration était lui aussi sous le choc. Ils avaient prévu un énorme bonus dans mon contrat, ce qui leur a vraiment fait mal (rires). Cela peut paraître arrogant, mais je pense que toutes les équipes pour lesquelles j'ai travaillé ont bénéficié de mon travail. Le Rapid a été champion deux fois après mon départ, par exemple. Beaucoup de joueurs que j'ai découverts dans les équipes de jeunes ou en deuxième division y ont contribué.

DFB.de : Pourquoi pensez-vous que le public allemand s'intéresse davantage aux échecs qu'aux succès ? Est-ce un phénomène allemand que de vouloir voir les stars tomber ?

Matthäus : Je ne sais pas si c'est un phénomène exclusivement allemand, mais c'est définitivement un phénomène en Allemagne, malheureusement. Je n'en suis qu'un exemple. C'est plus extrême pour Boris Becker. On se réveillait au milieu de la nuit pour le regarder jouer au tennis, on l'idolâtrait. Franz Beckenbauer, qui a donné à notre nation plus que quiconque, est un autre exemple. Personne n'a droit à un laissez-passer parce qu'il était un bon athlète, mais j'aimerais ici et là un peu plus de recul et moins d'envie de se nourrir des problèmes de nos stars.

DFB.de : Y a-t-il des décisions que vous regrettez dans votre carrière d'entraîneur ?

Matthäus : Seulement quelques-unes. Je ne regrette pas d'être allé à Belgrade, je ne regrette pas d'avoir pris la direction de la Hongrie. J'ai passé de bons moments en Israël.

DFB.de : Vous avez résilié votre contrat après seulement une saison au Maccabi Netanya.

Matthäus : Je ne regrette toujours pas d'y être allé. Je demande aux gens de regarder de plus près. C'est facile de considérer mon année là-bas comme un échec, mais ils étaient en pleine crise financière à l'époque et le propriétaire a vendu le club. Puis les cordons de la bourse se sont resserrés. Avec le recul, je n'ai fait qu'une seule grosse erreur en tant qu'entraîneur.

DFB.de : Laquelle ?

Matthäus : Le Brésil. J'ai été le premier Européen à entraîner en première division là-bas. C'était un honneur pour moi. Mais arrêté l'aventure après seulement deux mois, alors que nous n'avions pas perdu un seul match officiel pendant cette période. Je le regrette encore aujourd'hui. Il y avait des raisons personnelles à l'époque, et le président l'a compris, mais cela reste une erreur. Je suis donc d'autant plus reconnaissant envers le peuple brésilien pour la chaleur qu’il continue de m’accorder.

DFB.de : Votre carrière en tant que joueur a été plus grande que celle d’entraîneur. Vous faites partie des meilleurs joueurs de tous les temps, en Allemagne et dans le monde. Vous avez joué beaucoup de grands matchs, et beaucoup d'entre eux très bien. Parmi vos 150 sélections, laquelle a été la deuxième meilleure ?

Matthäus : Pourquoi demandez-vous la deuxième meilleure ?

DFB.de : Parce que la meilleure est évidente : la victoire 4-1 contre la Yougoslavie lors de la phase de groupes d'Italie 90.

Matthäus : C'est exact. La deuxième meilleure est difficile à dire. De mémoire, je me souviens d’un match de la Coupe du monde 1986. Nous avons joué contre le pays hôte, le Mexique, en quart de finale et nous nous sommes qualifiés après une séance de tirs au but. Le score était nul et vierge après 90 minutes. Il n'y a pas eu de résultat spectaculaire, pas de buts de rêve, mais c'était vraiment intense. Beaucoup de choses se sont bien passées pour moi et j'ai eu beaucoup de bons moments. Je me suis senti bien tout au long du match et j'ai pris énormément de plaisir sur le terrain. J'ai également transformé mon penalty lors de la séance de tirs au but. Ce match figure définitivement sur ma liste personnelle de mes meilleures rencontres.

DFB.de : Quel match a été le plus important pour votre développement en tant que joueur de l'équipe nationale ?

Matthäus : Ils ont tous été importants. Mais surtout la tournée en Amérique du Sud en 1982, avec les matchs contre le Brésil et l'Argentine. Cela fait 39 ans aujourd'hui, le jour de mon 21e anniversaire, et nous avons joué devant 170 000 spectateurs au Maracanã. C'est la plus grande foule que j'ai jamais vue. Ce match, et celui contre l'Argentine peu après, ont été les premiers moments forts de ma carrière internationale. Ce sont les premiers matchs que j'ai disputés pour l'Allemagne.

DFB.de : Vous avez toujours été un buteur efficace en club, mais vous n'avez pas trouvé le chemin des filets en équipe d'Allemagne avant votre 33e sélection.

Matthäus : C'est vrai, mon premier but a été marqué en avril 1985 contre la Tchécoslovaquie. Je voulais évidemment marquer, il était temps. C'était une volée à Prague, un joli but après un centre de Thomas Berthold. Ce match a été un tournant dans ma carrière en équipe nationale. Évidemment, on est plus reconnu quand on contribue directement au succès, mais le plus important à cette époque était la confiance que Franz Beckenbauer me témoignait. J'étais également un joueur du Bayern à ce moment-là, ce qui m'a aidé à me faire une place au sein de l'équipe.

DFB.de : Quelle a été la meilleure décision que vous avez prise pendant que vous jouiez pour l'Allemagne ?

Matthäus : C'est évident : la décision de ne pas tirer le penalty en finale de la Coupe du monde 1990. J'avais tiré les leçons de la finale du Pokal 1984, où j'avais manqué un penalty que je ne voulais pas tirer. J'étais plus fort en 1990 et j'aurais pu assumer cette responsabilité. On dit souvent que j'avais peur et que je me suis dégonflé, mais ce n'est pas vrai. Tout d'abord, je n'avais pas peur, j'étais un bon tireur de penalty et j'avais déjà marqué en toute sécurité en quart de finale et en demi-finale. Normalement, il n'y aurait eu aucune raison de ne pas le tirer, mais en finale, j'ai dû changer de chaussures et je ne me sentais pas à 100% en confiance avec les nouvelles. Il aurait été fou et égoïste de le tirer moi-même. Aussi sûr que le ciel est bleu, je savais qu'Andi Brehme allait marquer. Pas seulement lui, mais il y avait aussi deux ou trois autres personnes dont j'étais sûr qu'elles résisteraient à la pression. Il aurait été irresponsable de prendre ce penalty.

DFB.de : Vous avez disputé 150 matches avec la sélection, ce qui fait de vous le joueur allemand le plus capé de tous les temps. Qu'est-ce que cela signifie pour vous ?

Matthäus : C'est arrivé comme ça (rires). J'ai eu le privilège de jouer au football à un haut niveau pendant une longue période et j'avais encore assez de jus pour continuer à un âge avancé. Je ressens une certaine satisfaction, car beaucoup de gens m'ont écarté après mes blessures et ont dit que je ne serais pas capable de revenir. Jouer au football est la chose qui m'a apporté le plus de bonheur et je suis très heureux d'avoir pu le faire pendant si longtemps. C'était, et c'est toujours, ma plus grande passion et mon plus grand amour. Jouer pour l'Allemagne a été le point culminant de ma carrière, et il n'y a rien de plus beau pour moi que d'enfiler ce maillot.

DFB.de : Voyez-vous votre record être battu ?

Matthäus : Très peu de records sont éternels. Un bon exemple en est Robert Lewandowski, qui semble bien parti pour battre le record de Gerd Müller (40 buts en une saison de Bundesliga). Je suis sûr que mon record sera battu un jour, mais ce jour ne semble pas près d'arriver. Manuel Neuer a probablement les meilleures chances de me battre. S'il parvient à maintenir son niveau actuel pendant quatre ou cinq ans, il pourrait me dépasser.

DFB.de : Vos successeurs dans l'équipe d'Allemagne ont une compétition importante à venir cet été, le championnat d'Europe. Compte tenu du caractère de l'équipe et de la qualité des joueurs, de quoi pensez-vous que l'équipe est capable ?

Matthäus : Le football allemand et l'équipe nationale allemande ont toujours une bonne réputation dans le monde, à juste titre. Nous ne devrions pas nous rabaisser. Naturellement, l'élimination de l'équipe en phase de groupes de la Coupe du monde 2018 a été un gros revers, mais cela ne change rien au fait que personne ne voudra jouer contre nous. Nous sommes craints et respectés en raison de la qualité et de la mentalité de nos joueurs. Il y a encore eu quelques revers récemment et des erreurs ont été commises, ce qui fait que les résultats ne vont pas toujours dans notre sens. Mais je dirais que l'Allemagne n'est pas la seule à traverser des périodes difficiles. Une chose est claire pour moi, c'est que nous ne pouvons et ne devons pas excuser nos défaites par celles des autres. L'équipe nationale doit être à la hauteur, et je crois qu'elle peut l'être.

DFB.de : Qu'est-ce qui vous rend optimiste ?

Matthäus : Je pense que la décision de Joachim Löw de mettre fin à sa carrière de sélectionneur national après le Championnat d'Europe a été prise au bon moment. Toutes les personnes concernées sont maintenant au clair et un débat potentiellement difficile a été évité. En dehors de cela, j’ai confiance dans la qualité de l'équipe actuelle. De nombreux joueurs jouent dans les plus grands clubs des meilleurs championnats d'Europe. Naturellement, je pense que nous pouvons faire bonne figure à l'Euro.

DFB.de : L'Allemagne affrontera le Portugal, la France et la Hongrie lors de la phase de groupes du Championnat d'Europe. Que pensez-vous de ce groupe ?

Matthäus : Je pense que c'est une très bonne chose que l'Allemagne soit mise au défi dès le début et qu'elle ne prenne pas le risque de sous-estimer ses adversaires. Nous devrons être concentrés dès la première seconde du premier match, mais je suis convaincu que ce sera le cas. Nous avons également trois matchs à domicile, ce qui est un gros avantage. Je suis sûr que si nous sélectionnons les bons joueurs et qu'ils sont performants, nous pouvons passer le cap de la phase de groupes et aller loin dans la compétition.

DFB.de : Qui sont les bons joueurs à votre avis ?

Matthäus : Mon avis sur la question est connu, mais cela dépend toujours de la composition de l'équipe, sur le plan tactique. Lors de la Coupe des Confédérations, le trio arrière composé de Niklas Süle, Antonio Rüdiger et Matthias Ginter a très bien fonctionné. Bien sûr, jouer dans cette formation signifierait que d'autres positions sont impactées, auquel cas Joshua Kimmich pourrait être amené à jouer un rôle différent. Il y a beaucoup de choses à prendre en compte et à considérer pour Joachim Löw. En tant que supporters, nous pouvons observer les options qu'il décide de prendre et lui dire ensuite si ses choix étaient les bons ou les mauvais (rires).

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